Il y a 800 ans cette semaine que se signait dans une prairie au bord de la Tamise la fameuse Magna Carta des Britanniques – et cela en partie grâce à leur ennemis de toujours, les Français. En effet, excédés par le racket de leur roi Jean Sans-Terre, qui leur pompait tout leur argent pour aller se faire battre à plate couture par ces Froggies, en 1215 les puissants barons britanniques ont exigé une nouvelle panoplie de lois pour se protéger de leur roi (en France, bien sûr, on a fait plus fort quelques siècles plus tard en lui coupant tout simplement la tête).
Les Britanniques sont très fiers de cette grande charte à laquelle ils attribuent tous les mérites, y compris celui d’être tout simplement le fondement de leur démocratie (une monarchie parlementaire, puisqu’ils n’ont toujours pas coupé la tête à leur reine – quoique si Charles hérite enfin, il y a bien des chances…) ainsi que celle des États-Unis. La Magna Carta, c’est tout simplement la fin du roi tout-puissant, au dessus de tout droit.
Les points clés de ce texte sont les suivants:
• le roi ne peut lever des impôts sans l’accord des barons (ceux-ci sont aujourd’hui représentés par le parlement)
• les femmes ont le droit d’hériter des biens de leurs maris, et ne sont pas obligées de se remarier
• les enfants ont le droit d’hériter des biens de leurs parents (leurs tuteurs ne peuvent pas mettre les mains dessus)
• une peine doit être proportionnelle au crime commis, et personne ne peut être emprisonné sans un procès équitable
• la justice doit être rendue sans délai, et sans être achetée
• on utilisera désormais des mesures standardisées (pint etc) pour empêcher la fraude chez les commerçants
• tout commerçant peut entrer en Angleterre pour y travailler et la quitter librement
Mais bon il contient quelques perles qu’on préfère vite oublier:
• personne ne peut être arrêté ou emprisonné pour meurtre à la suite d’une dénonciation faite par une femme – sauf son mari
• les héritiers peuvent être donnés en mariage, mais pas a quelqu’un d’une classe sociale moins élevée
• aucune ville ni aucune personne ne peut être forcée à construire un pont sauf ceux et celles ayant déjà d’anciennes obligations
• si un homme meurt alors qu’il a des dettes chez un Juif, sa femme n’aura pas besoin de les rembourser
Le document a été un véritable échec, puisqu’il n’a pas réussi à empêcher la guerre civile entre le roi Jean et ses barons. Et seulement trois de ses clauses d’origines – mais pas des moindres – sont restées dans les grimoires britanniques: une loi garantissant la liberté de la Church of England; les droits et privilèges de la toute-puissante City of London; et l’interdiction des arrestations arbitraires et de la corruption de la justice.
Vous pouvez voir un exemplaire de la Magna Carta à la British Library de Londres (ou se trouve aussi en ce moment l’étonnante oeuvre d’art de Cornelia Parker, une tapisserie de la page wikipedia sur la Magna Carta). Il y en a également à la Bodleian Library d’Oxford, Lincoln Cathedral, et Salisbury Cathedral.